Des expéditions passées

Le changement d’heure est pour cette nuit. Une heure de moins pour lire, mais ce sont deux livres courts dont il se parle dans ce billet, des livres qui parlent « expédition ».

« Le journal de Tosa » Ki no Tsurayuki

Le vingt et unième jour de la douzième lune de l’an quatre (soit en l’an 935), un gouverneur de la province de Tosa quitte sa résidence officielle pour regagner la capitale. Il lui faudra cinquante-cinq jours pour couvrir les 400 kilomètres qui séparent cet endroit, situé sur la côte méridionale de l’île de Shikoku, de l’actuelle Kyoto, la Ville par excellence. Ce gouverneur est le célèbre poète de ce temps, Ki no Tsurayuki.

400 km en 55 jours, autant le dire, le voyage a été long. En 935 — le vélo n’existait pas encore — pour rentrer à la capitale, le gouverneur et sa cour longe la côte. La mer est capricieuse, les conditions de navigations sont telles que les escales sont nombreuses.

Il faut bien s’occuper pour tromper l’ennuie. Tout le monde est mis à contribution dans cette tâche, entre banquet et ivrognerie, des poèmes éclosent :

Quand vues du bateau
qui sur les flots va voguant
les âpres montagnes
elles aussi vont de même
les pins ne le sauraient-ils.

Écrit par un enfant de neuf ans, nous renseigne le texte.

  • Un livre très agréable à lire, édité chez Verdier (>fr)

« L’expédition polaire à bicyclette » Robert Benchley

Le monde tournait, trop bien, trop vite. Dieu s’ennuyait, accoudé au bar. Il songea à un petit supplément de chaos, un grain de sucre pour gripper l’engrenage, un poil à gratter les âmes. Et Dieu créa Benchley : costaud, flémardeur éclairé, haïssant les enfants au point d’en avoir deux, alcoolique tardif, libertaire jusqu’à en être conservateur. Tel fut Benchley. Ah, j’oubliais : chroniqueur à Life, Collier’s, au New Yorker et à Vanity Fair et accessoirement le plus bel humoriste américain de son temps.

Je dois avouer n’avoir jamais, au grand jamais, n’avoir jamais entendu parler de cette mémorable expédition avant que quelqu’un ne m’apostrophe dans la rue sur mon manque de culture cycliste.

Quelques articles de Life bien arrangés dans un tout petit livre, et voila que le rire vous attrape au ventre. Benchley se moque des explorateurs polaires — nous sommes en 1926 — qui se marquent à la culotte dans leurs exploits.

De nature méfiante envers les mécaniques complexes, il fait le choix d’un mode de locomotion sur, pratique et abordable, c’est-à-dire, la bicyclette.

L’itinéraire est simple : départ des bureaux du magazine, on longe la 5e Avenue, la 120e rue, on traverse le Bronx, le Canada, le détroit de Melville… après, pour rejoindre le pôle, c’est tout droit.

 

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